#3 - Le Garçon girafe - TNS, 2015

LE GARÇON GIRAFE

Texte : Christophe Pellet

Mise en scène : Anne Théron

 

Avec les élèves de 2ème année de l'école du TNS

Jim/Lucas : Romain Darrieu

Norman/Le Garçon à l'imperméable/Nils : Rémi Fortin

Lucie : Johanna Hess 

Nathalie : Maud Pougeoise

Clarisse : Blanche Ripoche

Julien : Adrien Serre

 

Assistante à la mise en scène : Aurélie Droesch (Élève en 1ère année - TNS)

Scénographe / costumière : Heidi Folliet

Régisseur son : Sébastien Lemarchand

Régisseuse lumière / régisseuse générale : Julie Roëls

 

 

Création au TNS

Répétitions : du 5 janvier au 6 février 2015

Représentations : Les 7, 8 et 9 février 2015

 

 


TROISIÈME SEMAINE : du 21 au 23 janvier 2015

Petite semaine, juste trois jours. Le dimanche et lundi, je dois travailler sur un film pour le cinéma, et le mardi accompagner mon équipe pour reprendre Contractions à la Ferme du Buisson. Comme nous avons répété le samedi de la semaine précédente, les comédiens font un break le lundi. A la technique, ça bosse, mais c’est toujours comme ça. On ne dira jamais assez à quel point la technique travaille. Sébastien prépare des sons, Julie pose les fenêtres avec Heidi. Aurélie fait travailler les comédiens le mardi, italienne soutenue. Il n’y a quasiment plus aucun problème de texte mais parfois de petites variations. Et je n’aime pas ça.

Je m’aperçois avec plaisir que je peux déjà déléguer à Aurélie la tenue du plateau. Elle est précise, ne lâche rien. Je peux lui confier le soin de faire répéter des scènes sans moi, elle a compris l’écriture de l’objet que nous fabriquons ensemble. Elle a compris que la direction d’acteurs, c’est du son, encore du son, toujours du son.

 

©Aurélie Droesch
©Aurélie Droesch

Quand j’arrive le mercredi, je me sens comme une gosse qui découvre ses paquets au pied du sapin de Noël. Les fenêtres sont là et je ne me suis pas trompée, c’est magnifique, cela donne une force incroyable à l’espace. Elles ouvrent sur un grand ciel bleu avec des nuages et créent une ambiance à cheval entre l’évocation et la pub. Pas de réalisme mais une suggestion d’un ailleurs possible.

Comme Aurélie, Heidi a compris l’objet qui convoque aussi bien la peinture, le cinéma que le théâtre. Les chaises qu’elle a trouvées pour le hors champ sont parfaites.

Je vérifie les costumes. Ça va, ça fonctionne. Mais décidément, je n’aime pas la coupe des pantalons années 80. Ils écrasent les fesses, montent haut sur la taille. Je m’aperçois que j’ai oublié cette époque. Présent/futur, je n’ai guère de passé. C’est peut-être pour cela que je m’entends bien avec des gens plus jeunes que moi.

Avec Sébastien, nous repassons la conduite son. Une fois de plus, nous n’avons pas le temps d’attaquer le troisième acte. Toujours courir après le temps. FUCK !

 

Et puis le travail de plateau recommence. Ce mercredi, le premier acte.

Les entrées sonores fonctionnent, fabriquent ce climat d’irréalité dans lequel le texte de Christophe Pellet prend une force accrue. La scène d’ouverture, longue, exige un gros travail des deux comédiens. Plonger immédiatement dans un rythme soutenu, conduire ce dialogue en sachant y amener des respirations, des suspens. Pour Rémi qui joue Norman, c’est assez terrible. S’il respecte la ponctuation, on entre très vite dans une prosodie lancinante et lassante. Glisser sur les phrases, sauter les points, trouver les endroits de respiration.

©Aurélie Droesch
©Aurélie Droesch

Une première partie fragmentée de trente minutes où Norman est omniprésent, un personnage egocentrique, angoissé et tourmenté. Mais en même temps si drôle. Le désespoir fait rire.

Faire basculer la fin du premier acte dans la tension et même une légère angoisse. Début de la liaison Julien/Clarisse, disparition ou mort de Norman. La passion commence à fabriquer son univers de cendres.

J’explique à Adrien/Julien à quel point cette scène est essentielle pour le personnage. Alors que Norman les surprend Clarisse et lui, Julien décide de laisser partir son meilleur ami pour rester avec Clarisse. Trahison/abandon : les dés sont jetés.

 

 

Le lendemain, attaque du deuxième acte.

Légère déception. Je pensais que les fondations tenaient mieux. Des fragilités surgissent, le rythme vacille parfois. Les comédiens fatiguent un peu, difficile d’exiger la concentration nécessaire. Mais peut-être qu’il faut ces moments de relâchement, savoir fermer un plateau pour revenir le lendemain après un temps de repos pour mieux recommencer.

 

©Aurélie Droesch
©Aurélie Droesch

 

Vendredi matin, je travaille avec Julie et Sophie sur la création lumière.

Séparer les espaces de jeu pour mieux transgresser les frontières. Dominante des LED sur le plateau, découpes et PC ailleurs. Froid/chaud. Julie connaît bien la pièce, elle a été attentive pendant toutes ces journées de répétition. Avec elle, comme avec les autres, nous parlons de la même chose.

L’après-midi, nous repassons le deuxième acte, et nous nous attaquons au troisième qui, bizarrement, est celui qui tient le mieux. Pourtant, d’un point de vue émotionnel, il est extrêmement violent.

Nous n’avons pas le temps d’aller jusqu’au bout car je veux faire un filage de l’ensemble pour la première fois. Dominique nous rejoint pour regarder le travail.

Deux heures sept. Il y a au moins dix minutes de trop. Manque d’énergie. Il ne s’agit pas d’accélérer le débit mais de dynamiser l’ensemble.

Sébastien a réussi à construire une première conduite son qui malgré ses trous donne déjà une véritable atmosphère à la pièce. Depuis qu’il a travaillé avec Grégory, Sébastien se décontracte. De mieux gérer la technique l’autorise à se concentrer sur l’artistique. Je suis rassurée, nous construisons un univers commun. Et il évite le piège de la musique, si souvent illustrative, pour chercher du côté du son et penser une autre entrée dramaturgique.

 

©Aurélie Droesch
©Aurélie Droesch

Trois jours de travail, trois jours intenses où la notion de temps disparaît. On entre dans une boîte noire, quand on en sort, il fait nuit et froid. Ce dimanche soir, à Paris, je songe à ce premier filage complet. Tout est là, il faut juste travailler, travailler.

Assouplir les enchaînements, fixer avec précision chaque détail. Mieux, donner à entendre ce glissement qui caractérise la pièce, glissement des personnages, glissement de la logique émotionnelle, glissement du désir et de la sexualité.

 

Le jeudi ou le vendredi, je m’aperçois que je suis fatiguée de travailler sur la mise en scène du désir, et de son effacement. J’ai parfois l’impression de lutter contre l’anéantissement général que raconte le texte. Et pourtant cette dernière scène, qui m’embarrassait tant, voire me gênait, ouvre tout à coup sur un nouveau possible. Nathalie est une caricature de la réussite sociale mais c’est elle qui amène l’idée d’un futur. Elle ose s’accaparer l’enfant que porte Lucie, l’amie de Nils, qui s’est laissé mourir. Nathalie ose tout, y compris proposer d’appeler Nils cet enfant qui va naître. Nathalie qui à sa manière ressuscite les défunts en leur accordant une seconde chance par corps interposés.

 

Il nous reste une semaine pour aboutir les choix de mise en scène. Création et conduite lumière, finir la conduite son, aboutir les personnages.

La semaine d’après, Jean-Louis arrive et nous commencerons à filmer.

 

 

Anne Théron

Le 25 janvier 2015

 

 


RÉPÉTITIONS : du 5 janvier au 6 février 2015

 

Le Blog des créations : L'équipe artistique poste chaque semaine des billets, des photos... pour dire où en est la création, les avancées, les tentatives, les doutes...

 

>> Semaine #1, billets de Anne Théron : ICI

>> Semaine #2, billets de Anne Théron : ICI

>> Semaine #3, billets de Anne Théron : ICI

>> Semaine #4-5, billets de Anne Théron : ICI

 

>> Les billets d'Aurélie, assistante à la m-e-s : ICI

>> Les billets des comédiens : ICI

 


Écrire commentaire

Commentaires: 1
  • #1

    JP (samedi, 07 février 2015 22:53)

    Représentation du samedi : Votre création m'a touché, cela a été un beau moment : intemporel car je n'ai pas vu passer les 2 h, visuel grâce à l'agencement des décors, aux lumières et aux mouvement des acteurs le tout étant très stimulant, sonore par les événements suggérés, et quelle émotion dans le 3e acte !